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Gros plan sur des optiques qui font avancer la science

L'un des aspects les plus fascinants de la science tient au fait que les plus grandes avancées résultent souvent de découvertes ou des progrès infinitésimaux. Et chez Thales, les petites entités sont régulièrement au coeur de grandes avancées scientifiques. La preuve avec Thales – SESO® Optics qui joue un rôle déterminant dans la démonstration d'une théorie qu'Einstein avait élaborée... en 1916.

Basé à Aix-en-Provence, Thales – SESO® Optics (pour Société Européenne de Systèmes Optiques) fêtera ses 60 ans en 2025. Une centaine de personnes, en majorité des ingénieurs et techniciens ultra-spécialisés, y travaillent sur plusieurs programmes, en collaboration notamment avec Thales Alenia Space. 

L’entreprise a pour spécificité de maîtriser des niveaux de précision extrêmes. « La précision de nos polissages est telle que nous sommes capables de voir et de traiter des défauts minuscules. Pour donner une image, c’est à peu près comme repérer et enlever un cheveu sur terrain de football », précise Christian du Jeu, directeur R&T chez Thales – SESO. « Cette précision est nécessaire dans les technologies de niche sur lesquelles nous travaillons – grands instruments d’optique, d’astronomie et d’analyse de la matière – qui exigent un savoir-faire très particulier, en conception comme en fabrication. »

Thales – SESO est surtout connu pour être un fabricant d’optiques haute précision, activité qui vient de mettre la société sous le feu des projecteurs.

Confirmation d'une théorie d'Einstein

En avril, l’entreprise a en effet remporté un contrat portant sur la fourniture d’un élément crucial pour le projet européen Advanced Virgo+. Ce projet, conçu pour détecter les ondes gravitationnelles prédites par Albert Einstein il y a cent cinq ans, s’appuie sur une immense installation mise en place en 2016 près de Pise, en Italie. Elle se compose de deux grands tunnels sous vide qui s'étendent sur 3 km dans la campagne toscane, avec des miroirs d’entrée et de sortie pour piéger la lumière. Ces deux tunnels sont perpendiculaires et la recombinaison de leurs deux faisceaux optiques crée des interférences.

Cet interféromètre est capable de détecter, entre ses deux bras, une différence de taille de l’ordre de 10^-19 mètres, causée par la contraction spatio-temporelle induite par les ondes gravitationnelles. « Cet ordre de grandeur n’a aucun équivalent scientifique, explique Christian de Jeu. Cela reflète toute la puissance de ce type d’instrument et c’est ce qui permet de confirmer la théorie d’Einstein. »

Pour y parvenir, on injecte dans l’installation un faisceau laser reflété environ 400 fois entre les quatre surfaces de miroir. S’y ajoutent désormais de nouveaux miroirs polis offrant les plus niveaux de précision possibles.

« Thales - SESO a été sélectionnée pour polir les quatre miroirs, d’un diamètre de 550 mm », poursuit Christian du Jeu (à gauche). « Afin d’assurer des performances aussi exceptionnelles, nous devons maîtriser des structures à une échelle subnanométrique, de la taille d’un atome. Cela représente une performance presque trois fois meilleure que les miroirs utilisés dans Advanced Virgo, l’actuelle version de l’instrument. »

Les ondes gravitationnelles, causées par des événements comme les fusions de trous noirs et d’étoiles à neutrons, ont été détectées pour la première fois en septembre 2015. Elles constituent ainsi un domaine parmi les plus en pointe en astronomie et une source de nouvelles technologies fascinantes. Ce domaine fournit de nouveaux éléments sur le fonctionnement de l’univers et, en particulier, de sa genèse.

Regarder vers et depuis l'espace

Le spatial n’est pas un secteur étranger à Thales – SESO. Plus d’une centaine de miroirs de l’entreprise sont embarqués sur des satellites en orbite ; et sur Terre, ses optiques équipent plusieurs des grands télescopes qui observent l’espace lointain. C’est d’ailleurs depuis l’un d’eux, installé à l’observatoire de Haute-Provence, qu’en 1995, Michel Mayor et Didier Queloz, lauréats du prix Nobel de physique, ont observé pour la toute première fois une exoplanète. Depuis, les optiques de l'entreprise ont contribué à l’observation de près de 4 500 exoplanètes, et leur mission est loin d’être achevée.

« Aujourd’hui, nous continuons de participer à la production de composants pour des spectromètres de nouvelle génération. Nous avons aussi produit des optiques équivalentes pour les astronomes indiens, ce qui leur a permis de détecter leur première exoplanète », souligne Christian du Jeu.

Thales – SESO n’aide pas seulement à observer l’espace, mais également l’évolution même de notre planète. L’entreprise est très impliquée dans le programme Copernicus, aux côtés de Thales Alenia Space (TAS), notamment pour le projet CO2M. Sous la conduite de TAS, un spectromètre comportant plusieurs composants conçus et produits par Thales – SESO aide à mesurer les niveaux de CO2 terrestres. « Le projet permettra de cartographier le taux de CO2 partout sur la Terre avec une résolution de 2 km², toute la planète étant cartographiée en onze jours par un satellite, ou en six par deux », indique Christian du Jeu. Ainsi toutes les sources de CO2 seront détectées et suivies, ce qui permettra des améliorations notables de notre environnement. »

Les miroirs de Thales – SESO et le virus du covid-19

Sur Terre, la précision et l'innovation facilitent les découvertes scientifiques dans d’autres domaines. L’entreprise travaille aussi dans le domaine des lasers, en particulier des lasers pétawatt, qui requièrent des optiques de grande dimension, et dont le flux laser très intense nécessite des traitements de surface très spécifiques.

Et pour revenir à l’infiniment petit, Thales – SESO a également produit plus de 1 500 miroirs pour synchrotrons* à rayons X. Ces miroirs en silicium, d’au moins un mètre de long, transportent le faisceau de rayons X émis par le synchrotron jusqu’aux chambres expérimentales, et permettent aux utilisateurs de régler finement l’analyse des objets les plus petits. « La forme spécifique du virus du Covid-19 a été analysée à l’aide de nos miroirs actifs brevetés », souligne Christian du Jeu.

Un tel niveau de précision et de détail requiert des machines très spéciales – et des compétences très pointues chez les techniciens qui les utilisent. Thales SESO fournit des services quasi uniques dans le monde, en partant d’un objet solide – un bloc de verre. Chaque projet est unique, et l’expertise maison réside dans la capacité de ses collaborateurs à imaginer les conceptions les plus adaptées, et les meilleures solutions d’usinage, de polissage et de revêtement de ces blocs de verre, pour parvenir au résultat voulu. 

« C’est une profession qui associe simultanément des approches manuelles et robotiques », ajoute Christian du Jeu. « Manuelles, parce que manipuler du verre tout en garantissant les niveaux de précision nécessaires aux mesures et aux intégrations nécessite application et rigueur. De telles performances ne sont possibles que grâce à un labeur artisanal et des processus itératifs qui peuvent prendre des mois. Robotiques, parce que chaque étape, comme l'usinage, le polissage ou le revêtement, est réalisée à l’aide de machines à commande numérique. Mais là encore, il faut des compétences spécifiques, souvent obtenues lors de formations internes. »

L’entreprise opère dans un environnement toujours plus complexe, et les exigences de performance vont croissant – en parallèle à la pression sur les coûts. Thales – SESO optimise constamment les processus et explore de nouvelles technologies innovantes pour améliorer même les plus petits détails, parce que l’entreprise sait, sans doute mieux que quiconque, combien l’infinitésimal mène à des découvertes majeures.

*anneau accélérateur de particules pour générer des rayons X